29.12.07

Soleil se lance dans l'ésotérisme

Souvent assimilées au domaine de l’héroïc-fantasy, les éditions Soleil se passionnent désormais pour les univers ésotériques. Deux nouvelles collections sont annoncées… en compagnie d’un titre leader : l’adaptation BD du Testament des Siècles, le fameux best-seller d’Henri Lœvenbruck…

Le Testament des Siècles est le premier album des « Secrets du Vatican », la nouvelle et ambitieuse collection ésotérique de l’éditeur Soleil. Il s’inscrit dans la lignée des remises en cause du dogme catholique et des évocations du fonctionnement secret de l’Église, démarrée avec Le Triangle Secret de Didier Convard et consorts, ou l’adaptation BD de Qumran d’Aliette Abecassis par Pierre Makyo chez Glénat, Le Messager d’Hervé Richez chez Bamboo, voire Le Janitor d’Yves Sente chez Dargaud.

Damien Louvel, jeune français émigré à New-York, devenu scénariste pour la télévision, apprend la mort brutale de son père en pleine nuit dans le petit village provençal de Gordes où ce dernier venait de s’installer. Convoqué à Paris chez le notaire, il découvre une face nouvelle du défunt qui le trouble. Aidé par une séduisante journaliste, Diane de Saint-Elbe, il se précipite à son corps défendant dans une dangereuse enquête autour d’une mystérieuse pierre de Iorden qui l’entraîne dans des univers inconnus et l’oppose à des sociétés secrètes.

Ce thriller rythmé et intéressant rappelle l’atmosphère du fameux Da Vinci Code, ce qu’un autocollant en couverture souligne. Son auteur, Henri Lœvenbruck, l’a d’ailleurs écrit à la même époque. Il réussit cette adaptation BD avec l’aide de Nicolas Jarry, romancier et auteur BD, déjà scénariste de l’excellente série La Rose et la Croix chez le même éditeur. Le dessinateur Christian Pacurariu avait participé aux Légendes de la Table ronde de Ronan Le Breton dans la collection « Soleil Celtic ». Il se plie ici, avec plus ou moins de bonheur, au style contemporain réaliste. À noter une magnifique couverture réalisée par Djief.

Nouvelles collections chez Soleil

Les éditions Soleil, l’un des éditeurs diffusés par Delsol (alliance avec Delcourt), multiplient les collections alors que d’autres - comme Le Lombard - tentent de se recentrer. Après « Soleil Celtic » qui rassemble des albums de styles très variés sur le thème de la Bretagne, son directeur de collection Jean-Luc Istin crée deux nouvelles collections :

  • « Terres secrètes » avec des titres comme Corpus Hermeticum (par Missoge et Fino), Le Syndrôme de Caïn (par Tackian et Mutti) dont les trois premiers tomes sont prévus pour janvier 2008 et La XIe Plaie (par Syve et Jud) à paraître aussi en janvier 2008.
  • « Secrets du Vatican » avec une dizaine de titres prévus en 2008 : après le premier volume du Testament des Siècles, adaptation BD du thriller de Loevenbruck par Jarry et Pacurariu, viendront Les Carnets Secrets du Vatican (trois tomes prévus de janvier à mai 2008) par Novy et Popescu, puis L’Antichristus, L’Atlandide Experiment, Le Cinquième Évangile, L’Ordre des Dragons et Succubes.

Après la collection « Loge Noire » de Glénat - au bilan finalement assez mitigé malgré l’immense succès du Triangle Secret - et des séries comme Le Janitor chez Dargaud, Soleil plonge donc à son tour dans l’ésotérisme et les mystères de l’Église catholique.

Le pari est de proposer des séries aux sorties rapprochées pour encourager les libraires à les conserver en rayon, rassurer les lecteurs impatients et/ou échaudés par l’absence de continuité d’une série, élargir la base des lecteurs avec des sujets à la mode. Pour se faire, l’éditeur a souvent fait appel à de jeunes auteurs, notamment italiens et roumains.

Le lancement de la collection « Secrets du Vatican » est prévu le 23 janvier, pendant le festival international d’Angoulême.

Source : AURACAN

18.12.07

Un monde invisible et incroyable

Mardi 11 décembre se tenait une nouvelle soirée de l'INREES autour de la projection du film documentaire “Enquête sur le Monde invisible" de Jean-Michel Roux, en présence du réalisateur et de Stéphane Allix, cofondateur de l'INREES. Ce film surprenant, tourné en Islande, explore un monde auquel nous n'accordons plus aucun crédit, celui des elfes, des gnomes, des fantômes, des monstres aquatiques, des ovnis, des anges gardiens. Tout ce monde qui ne nous semble qu'imaginaire.

Une petite fille nous conduit devant la demeure d'une famille elfe. Il s'agit d'un gros rocher grisâtre, en bordure de prairie. Ils y vivent à l'intérieur et elle a la chance de les voir régulièrement.
Vigdís Finnbogadóttir, qui fut la première femme au monde à être élue présidente de la république, nous précise qu'en Islande les elfes sont pris très au sérieux. Elle attribue cela au fait que son pays a été très peu touché par le christianisme, qui s'est toujours battu contre les croyances et cultes païens, au point de les faire disparaître. En Islande, les cultures ancestrales ont pu garder tout leur poids. Ce n'est pas le druide que nous voyons célébrer un mariage qui dira le contraire.
Le ministre des transports se réjouit de disposer d'une carte du monde invisible, qui repère les habitations d'elfes. Elle l'aide à ne pas les endommager lorsque des travaux de voirie sont planifiés.
Les témoignages se succèdent, consistants, cohérents.
Une enseignante d'un collège situé en bordure de lac, décrit la vision d'un monstre aquatique, aussitôt confirmée par de nombreux élèves. Un propriétaire d'hôtel fait le tour de ses chambres avec un medium pour dialoguer avec les fantômes résidents, aidant certains à retrouver le chemin de la lumière, rassurant d'autres sur les bonnes intentions du maître des lieux à leur égard.

Un père medium explique le rôle crucial de l'éducation. Tous les enfants racontent des expériences de contact avec des êtres extraordinaires. Lui ne leur dit pas que ce sont des sottises. Il les écoute et croit en leurs histoires. Ce faisant il laisse ouverts, chez ses enfants, des canaux de perception qui, sinon , perdraient toute sensibilité.

Tout ceci parait bien déroutant à notre esprit forgé par la rationalité scientifique. Comment est-ce possible ?
Un chercheur en physique quantique propose une métaphore : l'homme est comme une radio qui ne serait capable de percevoir que 0,5% des fréquences émises. Pourquoi alors s'étonner de ne pas comprendre les 99,5% restantes ? Il rappelle également que l'Islande se trouve à la jonction des plaques tectoniques américaine et européenne, ce qui engendre des anomalies gravitationnelles.

Alors, à cet instant, vous qui lisez ces quelques lignes : que pensez-vous ?
- ne seraient-ils pas un peu fous dans ce pays !
ou bien
- quelles qualités de clairvoyance !

Pour regarder un tel film ou aborder tout phénomène surprenant, une solution : suspendre son jugement.
Ecouter, voir, ressentir, s'émouvoir, imaginer, capter, sans décider si c'est vrai ou faux, sans chercher s'il faut y croire ou non, parce que justement l'incroyable ne s'aborde pas à renforts de croyances sous peine de se saborder.

Comme l'a dit Bodhidharma :

“Le conflit entre le pour et le contre,
Voilà la maladie de l'esprit“

Appréhender les expériences extraordinaires sous l'angle de la réflexion est voué à l'échec.
La réflexion juge, classe, compare des données en s'appuyant sur les croyances. Ce faisant, elle tente de rapprocher ces informations entrantes avec un référentiel capable de n'évaluer que des situations habituelles et déjà répertoriées. La sanction est alors impitoyable et l'esprit se ferme totalement à la réception d'informations jugées pernicieuses ou bien il s'en amuse et leur colle une étiquette dénigrante pour protéger la conscience d'une exploration trop dangereuse. La peur de l'inconnu !

L'esprit s'ouvre à mesure que la réflexion s'estompe.
La réflexion agit comme un diaphragme. Plus il se ferme plus la lumière se diffracte et irradie, augmentant la profondeur de champ, agrandissant la zone de netteté, dévoilant alors les contours de ce Monde Invisible.

Prochaine soirée : le jeudi 24 janvier 2008 pour la projection du film "VOIR (sans les yeux)“, de Marie Mandy, qui tente de simuler la perception du monde qu'ont les non voyants.

Source : Selfway

13.10.07

Vérités divines à notre portée ?

L'ésotérisme (le sens caché) n'est pas spécifique aux soufis. Les Chiites l'ont développé dès le premier siècle de l'Hégire. On verra d'ailleurs que les précurseurs du chiisme, furent aussi ceux du soufisme. Mais dans le mysticisme le sens caché ne se révèle pas par l'interprétation, activité somme toute rationnelle, mais par l'élévation du cœur (l'âme) au monde suprasensible. Cette élévation nécessite une ascension spirituelle et une expérience individuelle extatique, sans lesquelles les vérités divines resteraient à jamais obscures pour l'âme.


14.9.07

« J'étais franc-maçon ! »

« Oui, j'ai été franc-maçon pendant quinze années et j'ai eu l'insigne. Une grâce que Jésus vienne à ma rencontre à Lourdes avec douceur, alors que je venais d'avoir cinquante ans ! Ma vie de païen endurci ne laissait pas espérer une telle conversion... ». Maurice Caillet, ancien franc-maçon et occultiste, a vécu à 50 ans un retournement inattendu de sa vie en découvrant le message libérateur de l'Evangile. Témoignage d'une conversion brutale.

Maurice Caillet

À 50 ans, Maurice Caillet était engagé depuis quinze ans dans la franc-maçonnerie. Chirurgien, libre-penseur, il s’intéressait à l’ésotérisme et à l’occultisme ; anticlérical convaincu, il était l’un des promoteurs de I’IVG en Bretagne et avait pratiqué de nombreux avortements...

« Au cours de l'année 1983, mon épouse tombe gravement malade. Ni les médecins ni les guérisseurs ne parviennent à améliorer son état. Mû par une impulsion peu originale, et en désespoir de cause, je décide de l'emmener à la montagne, à Font-Romeu, dans les Pyrénées Orientales. Là, cependant, aucun signe d'amélioration ne daigne se manifester. C'est alors que me traverse l'idée - bien saugrenue, il faut l'avouer, pour un matérialiste francmaçon de mon espèce - de passer par Lourdes en remontant vers la Bretagne. Si l'endroit n'était certainement pas pour moi lieu privilégié de la Grâce, il se révélerait peut-être, pensais-je alors, une sorte de creuset particulier "d'énergies" effectives, un point de concentration privilégiée de puissances "cosmo-telluriques", ou de je ne sais quoi de potentiellement générateur d'un choc psychologique aux effets bénéfiques.

Par un petit matin de février glacial, je conduisis ainsi mon épouse aux piscines. Tandis qu'elle s'y baignait, cherchant un endroit pour m'abriter du froid, voici que je pénètre dans la crypte au moment précis où débutait une messe de semaine. Jamais de ma vie je n'avais réellement écouté une messe. Là, assis au fond, j'ai écouté attentivement. A un moment donné, le prêtre s'est levé pour proclamer l'Évangile du jour : « Demandez et l'on vous donnera ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l'on vous ouvrira. » (Mt 7 ; 7). Le choc. Cette phrase, utilisée dans les rituels francs-maçons d'initiation au grade d'apprenti, m'était bien familière ; mais en cet instant j'apprenais non sans trouble qu'elle avait été prononcée à l'origine par Jésus, celui que je tenais confusément pour un grand philosophe, ou un grand initié. Le prêtre s'est assis, et, dans le silence qui a suivi, j'ai très nettement entendu une voix, infiniment douce, résonner dans ma tête. Elle disait : « C'est bien, tu demandes la guérison de Claude. Mais toi, qu'as-tu à offrir ? ». De ce que pouvait être l'offrande je n'avais absolument aucune notion ; et cependant, en l'intervalle de quelques secondes, je n'ai vu que moi à offrir.

A l'issue de la messe j'ai rejoint le prêtre dans la sacristie, lui demandant tout de go s'il pouvait me baptiser. Devant sa surprise j'ajoutais que j'étais franc-maçon. A peu près comme s'il avait aperçu un diable dans un bénitier, il bredouilla quelque chose comme : « Ouh…alors là c'est un peu compliqué, il va falloir aller voir l'Archevêque de Rennes, et puis… ». Légèrement froissé, je redescendis à la grotte où m'attendait, frigorifiée, mon épouse. Je lui demande comment l'on fait un Signe de Croix, comment on récite le Notre Père. Elle croit d'abord à de l'ironie, mais constate mon émotion. Toutes mes convictions philosophiques tombent les unes après les autres en l'espace de quelques minutes. Puis les jours qui suivent voient se développer mon avidité de connaître les prières, l'Évangile, les fondements de la foi ; je me mets à lire les Pères de l'Église...

A Rennes, je rencontre des amis rosicruciens appartenant également, sans contradiction apparente, à une Église orthodoxe gallicane, en filiation avec l'Église de Roumanie, et qui m'aident à y être accueilli. Au cours de la veillée pascale suivante, en larmes et profondément bouleversé, je reçois le baptême, avec, de surcroît, après 13 mois d'alitement, la grâce de la guérison de mon épouse. J'effectue alors une année de propédeutique en théologie pour combler mes lacunes dans le domaine religieux. En 1987, de plus en plus gêné par la concentration de marginaux dans cette Église gallicane où s'opérait un farfelu mélange de rosicruciens, de spirites et autres, et saisi par ailleurs d'une profonde admiration pour Jean-Paul II - en particulier pour ses efforts en faveur de l'oecuménisme -, j'ai demandé mon passage dans l'Église Catholique. Et les grâces continuèrent de se succéder. Sur le conseil d'un moine bénédictin mon épouse et moi-même, tous deux divorcés remariés, obtînmes de pouvoir nous marier à l'Église, après une dispense de Rome pour l'un et la reconnaissance de nullité pour l'autre. Nous permettant d'entrer tous deux en plénitude dans l'Église, le Sacrement commença alors de déployer son Mystère, renouvelant en profondeur et jusque dans son intimité notre relation matrimoniale.

Par la suite il nous a été donné de rencontrer le Renouveau Charismatique, et de recevoir l'effusion de l'Esprit Saint. Ce fut, si l'on peut dire, comme une seconde conversion - celle du coeur. Mon épouse reçut ce que l’on appelle un charisme de connaissance et de guérison, et dans un nouveau cabinet médical nous avons assisté à des guérisons extraordinaires qui constituèrent le fondement de mon dernier livre, « Rien n'est impossible à Dieu » (Ed. du Sarment). Puis, à 60 ans, pleinement disponible pour témoigner, j'ai continué à écrire livres et fascicules. L'ancien franc-maçon que j'étais fut admis à l'association des écrivains catholiques tandis que le gynécologue matérialiste et pragmatique que je reconnaissais avoir été rejoignait la fondation Jérôme Lejeune, demandant personnellement le pardon de ce dernier... »

Aujourd'hui, donc, Maurice Caillet témoigne. Il a publié de nombreux livres où il raconte sa conversion, comme Rien n'est impossible à Dieu. L'un d'eux, Ocultisme ou christianisme, traitre des sujets suivants : l'ésotérisme, le spiritisme, la radiesthésie, magnétisme et guérison occulte, acupuncture, animisme, anthroposophie, gnose, homéopathie, nouvel-âge, ostéopathie, sophrologie, sourciers et sorciers, taï-chi-chuan, yoga...

Source : Anuncioblog


9.9.07

De l'Esotérisme et des Cathares : le fil ténu entre religion et croyances


Nouvelle chronique littéraire du psychanalyste Jean-Luc Vannier qui rassemble deux ouvrages portant sur les diverses manifestations de l’ésotérisme et sur l’histoire parfois oubliée des Cathares. Un lien étroit, au-delà de l’éloignement historique, unit pourtant ces deux spiritualités dont l’adhésion et la pratique requièrent une forme d’engagement de l’esprit aussi rigoureuse qu’individualisée.

Les enquêtes sociologiques confirment la tendance : une partie des Européens abandonne la pratique régulière des religions monothéistes pour adhérer à des croyances aux formes et aux contenus les plus variés. Le rejet d’un dogme intransigeant constitutif des premières profiterait ainsi aux secondes, en apparence plus souples et à la dimension humaine plus accessible. Au point d’oublier parfois que les différents éléments de l’ésotérisme émanent en général des traditions bibliques ou coraniques. D’où l’attention qu’il convient d’accorder à une récente publication des Editions « Tallandier » réalisée avec la collaboration du « Point » : « L’ésotérisme. Kabbale, franc-maçonnerie, astrologie, soufisme…les textes fondamentaux commentés ».

On découvrira avec un double intérêt, intellectuel et visuel, un ouvrage fort bien documenté, didactique comme une rentrée des classes mais plaisant par sa facture artistique. Ce mélange des genres, entre dictionnaire et livre d’art, rend accessible une connaissance des courants de pensées les plus anciens aux mouvements ésotériques les plus contemporains.

Ces commentaires éclairés et illustrés, présentés sous la forme de dossiers séparés et consultables comme des fiches, ne se contentent pas de nous retracer l’apparition des cultes à mystères et des sociétés d’initiés en Haute Egypte et dans la Grèce antique. En nous propulsant également dans le mysticisme chrétien de la Renaissance condamné puis partiellement réhabilité par l’orthodoxie vaticane, en nous expliquant l’apparition de la kabbale juive du XIIème siècle en réaction aux abstractions du judaïsme, en insistant enfin sur l’universalisme du soufisme centré sur sa promesse d’amour, les spécialistes rassemblés pour l’occasion démontrent la profondeur abyssale et rigoureuse de ces quêtes le plus souvent entreprises par des individus isolés.

L’être moderne, en recherche sur lui-même, sera probablement touché par la beauté de certains passages issus de textes anciens et souvent ignorés d’un large public. Impressions à même de lui rappeler l’authenticité d’un cheminement, bien éloignée des ésotérismes de façade et sur mesure que ce dernier se plaît à pratiquer comme une discipline sportive du week-end.

Une « ascèse personnelle particulièrement rigoureuse », mélange de gnose et de christianisme primitif, fut également source d’inspirations des « bons hommes et des bonnes femmes » dont Anne Brenon nous propose de découvrir les priorités spirituelles dans un livre passionnant, véritable immersion dans l’univers mystérieux des Cathares.

Alors que la Réforme grégorienne à l’œuvre depuis le milieu du XIème siècle tente, selon l’auteur, de « mettre en ordre le monde chrétien », cette « multitude d’hommes », adeptes d’un « ordre religieux très ritualisé », fonde son existence sur une stricte interprétation de l’évangile johannique mettant en exergue l’opposition radicale entre Dieu et le monde.


Non contents d’admettre également des femmes au sein de leur Eglise les Cathares puisent également leur force dans leur insertion au plus intime des villages, notamment par le phénomène de la « maison cathare », sorte d’établissement religieux de proximité en plein cœur de la cité et aussi accessible qu’un habitat de particulier. Autant de critères qui ne répondent évidemment pas aux normes définies par Rome. L’Eglise catholique a tôt fait de les tenir pour des hérétiques, d’où leur nom ultérieur de Cathares (probablement dérivé du « Katze » allemand, le « chat » considéré comme un animal diabolique). Le docétisme qui pousse ces lettrés et prélats à refuser la nature humaine du Christ, les amène également à réfuter sa souffrance sur la Croix, instrument d’une torture qu’il faut, selon eux, plutôt vilipender que vénérer. Cette religion articulée autour de la négation du sacrement de l’autel s’implante en profondeur au début du millénaire dans les « domaines de l’aristocratie rurale » situés en Occitanie (Narbonne, Toulouse, Albi…) et, plus curieusement, en Italie du nord où leurs églises connaissent avant la fin du XIIème siècle un développement considérable. Au point, nous dit Anne Brenon, d’interdire dans un premier temps à l’Eglise romaine « d’exercer la moindre répression ».

Cette dernière ne tardera toutefois pas à venir. Avec force procès et bûchers, la puissante machine inquisitoriale mettra presque une centaine d’année à venir à bout de ceux qui se voient en authentiques chrétiens apostoliques, victimes à leur tour d’une église persécutrice.

« L’Esotérisme. Kabbale, franc-maçonnerie, astrologie, soufisme…les textes fondamentaux commentés », Sous la Direction de Catherine Golliau, Textes choisis et commentés par Armand Abécassis, Xavier Accart, Réza Moghaddassi, Olivier Souan et Eric Vinson, Editions Tallandier, 2007, 130p., 15 euros.

17.8.07

Conversations avec des enfants

Édition nº 153 : Conversations avec des enfants

Qu'est-ce que la trahison ?

Le prophète se promenait dans la rue et demandait : « Ne sommes-nous pas tous les enfants du même Père Éternel ? »
La foule acquiesçait. Et le prophète continuait : « Et s'il en est ainsi, pourquoi trahissons-nous notre frère ? »
Un gamin qui assistait à la scène demanda à son père : « Qu'est-ce que trahir ?
– C'est trahir ton camarade pour obtenir un certain avantage.
– Et pourquoi trahissons-nous notre camarade ? insista le gamin.
– Parce qu'autrefois quelqu'un a commencé. Depuis lors, personne ne sait comment arrêter la ronde. Nous sommes toujours en train de trahir ou d'être trahis.
– Alors, je ne trahirai personne », affirma le gamin.
Et c'est ce qu'il fit. Il grandit, reçut beaucoup de la vie, mais tint sa promesse.
Ses enfants souffrirent moins et reçurent moins.
Ses petits-enfants ne souffrirent de rien.

Sur la jalousie

À onze ans, Anita alla se plaindre à sa mère. « Je n'arrive pas à me faire des amies. Comme je suis très jalouse, elles s'éloignent. »
La mère était en train de s'occuper de petits poussins qui venaient de naître, et Anita en prit un, qui immédiatement tenta de s'enfuir. Plus la petite le serrait dans sa main, plus le petit poussin se débattait.
La mère commenta : « Essaie de l'attraper doucement. »
Anita obéit. Elle ouvrit les mains, et le petit poussin cessa de se débattre. Elle commença à le caresser et il se blottit entre ses doigts.
« Les êtres humains aussi sont comme ça, dit la mère. Si tu veux les attraper à tout prix, ils s'échappent. Mais si tu es douce avec eux, ils resteront toujours à tes côtés. »

Les trois choses

Chen Ziqin demanda au fils de Confucius : « Ton père t'enseigne-t-il quelque chose que nous ne savons pas ? »
L'autre répondit : « Non. Un jour où j'étais seul, il a demandé si je lisais des poésies. J'ai répondu que non, et il m'a envoyé en lire quelques-unes, parce qu'elles ouvrent dans l'âme le chemin de l'inspiration divine.
« Une autre fois, il m'a demandé si je pratiquais les rituels d'adoration de Dieu. J'ai répondu que non, et il m'a envoyé le faire, car l'acte d'adorer me permettrait de me comprendre. Mais il ne m'a jamais surveillé pour voir si j'obéissais. »
Lorsque Chen Ziqin se retira, il se dit :
« J'ai posé une question, et j'ai obtenu trois réponses. J'ai appris quelque chose sur les poésies. J'ai appris quelque chose sur les rituels d'adoration. Et j'ai appris qu'un homme honnête ne surveille jamais l'honnêteté des autres. »

Pour faire venir la pluie

Après quatre ans de sécheresse dans le tout petit village, le curé réunit tout le monde pour un pèlerinage jusqu'à la montagne ; on y ferait une prière collective pour demander le retour de la pluie.
Dans le groupe, le prêtre remarqua un gamin, portant des vêtements chauds et couvert d'un imperméable.
« Tu es devenu fou ? demanda-t-il. Dans cette région, cela fait cinq ans qu'il n'a pas plu, et dans la montée tu vas mourir de chaleur !
– Je suis enrhumé, mon père. Si nous demandons à Dieu qu'il pleuve, vous avez imaginé le retour de la montagne ? Le torrent d'eau sera tel que j'ai besoin d'être prêt. »
À ce moment-là, on entendit un grand fracas dans le ciel et les premières gouttes commencèrent à tomber. Il avait suffi de la foi d'un enfant pour réaliser un miracle attendu par des milliers d'hommes.

27.6.07

Au nom du paganisme celte

A Quimper et alentour, la fin d'un cauchemar coïncide avec un coup de théâtre. La série de profanations et de dégradations de calvaires opérées entre le 8 et le 20 mai, et qui avait culminé à la mi-juin avec l'incendie criminel d'une chapelle, semble close. Mais les trois hommes arrêtés le 21 juin par la gendarmerie, mis en examen et écroués, n'ont pas le profil attendu. Agés de 21 et 22 ans, les trois suspects, dont l'identité n'a pas été révélée - on sait juste qu'ils sont originaires du Finistère sud, sans emploi pour deux d'entre eux, le troisième travaillant dans une collectivité locale - ne sont pas les "satanistes" que de nombreux indices laissaient imaginer.

Selon Anne Kayanakis, procureur de Quimper, les suspects, en reconnaissant les faits, se sont présentés comme des défenseurs des "cultes païens anciens", sans faire la moindre référence à Satan. En s'attaquant à des monuments religieux - souvent édifiés sur d'anciens sites celtiques -, ils voulaient dénoncer "la toute-puissance de la religion chrétienne qui a fait disparaître les traces des cultes païens". Ils jugent "anormal" d'entretenir avec des fonds publics des chapelles et des calvaires alors que les mégalithes druidiques et certains sites mythiques ne font pas l'objet des mêmes soins.

La singularité de leur motivation s'inscrit dans un contexte culturel particulier. Très attachée à ses racines et travaillée par un imaginaire peuplé de fées, d'elfes et autres figures légendaires, la Bretagne constitue un terreau favorable pour l'ésotérisme et l'occultisme. Cela n'enlève rien à la gravité des faits passibles de vingt ans de réclusion. Suivre à la trace la chevauchée, si peu héroïque, de ces "cavaliers de l'apocalypse" relève du chemin de croix. Ce sont en effet ces monuments, balisant presque chaque carrefour de la Bretagne, qui ont été leurs cibles, dans un périmètre de quelques dizaines de kilomètres du Finistère sud.

La première profanation a été commise à Gouesnac'h, dans la nuit du 7 au 8 mai à la chapelle de Saint-Cadou. Dans la nuit du 11 au 12, c'est à Langolen qu'un calvaire du XIVe siècle a été mis à bas. Cinq nuits plus tard, la même rage destructrice frappait les calvaires de la chapelle du Drennec, à Clohars-Fouesnant, de la chapelle Saint-Thomas, à Pleuven, et de la chapelle du Perguet, à Bénodet.

Dans la nuit du 17 au 18, les profanateurs ont franchi l'Odet, qui marque la "frontière" du pays bigouden et du pays fouesnantais, pour barbouiller la fontaine de la chapelle Notre-Dame de la Clarté, à Combrit, puis la fontaine de la chapelle Sainte-Côme, à Plomeur. Enfin, le 20 mai, c'est à Ergué-Gabéric, près de Quimper, que la chapelle Ker Devot a été l'objet de dégradations.

Chaque fois, l'inscription "TABM" était tracée à la peinture noire, souvent accompagnée d'une croix renversée, signature attribuée aux adorateurs de Satan. Et le mode opératoire, celui d'un commando. Des cordes, tirées par un véhicule, ont dû être utilisées. Pierre Floc'h, sculpteur sur pierre, qui restaure régulièrement des calvaires après des dégradations, est formel : "Sur les cinq lieux où l'on m'a demandé de faire des expertises, une tension a été exercée à partir du haut pour faire basculer les fûts qui parfois ont été cassés en dizaines de morceaux. Mises à part les croix de mission du XIXe siècle, la plupart des monuments datent du XVIe siècle. On a recensé plus de 3 000 calvaires et 350 chapelles, rien que dans le Finistère."

Jean Loaec, maire de Pleuven, précise : "Les calvaires, toujours tournés vers l'Occident, commémorent la crucifixion et comportent au moins trois personnages tandis que les croix ne représentent que le Christ crucifié. Elles marquent parfois les anciennes limites d'une communauté monastique."

Après le 20 mai, les raids nocturnes ont cessé. A la veille de la saison estivale, toute la région respirait mieux. Scandalisés par ces atteintes à un patrimoine historique autant que religieux, certains esprits s'étaient échauffés. Ici ou là, des tours de garde étaient envisagés. "Au-delà du coût pour les contribuables, nous sommes choqués de voir que ces actes odieux ne provoquent aucune réaction médiatique comme quand des lieux de culte ou des cimetières juifs ou musulmans sont vandalisés", s'indigne un commerçant de Bénodet, en dénonçant "une tolérance à l'égard de la christianophobie".

Dans la nuit du 15 au 16 juin, les hostilités ont repris, un cran au-dessus : la chapelle de Loqueffret, au coeur des monts d'Arrée, soit à plus de 60 km des premiers lieux vandalisés, a été incendiée, toujours avec la même signature, tracée sur un pilier du porche, "TABM".

A l'écart du bourg de Loqueffret, il faut parcourir plus d'un kilomètre à travers bois pour découvrir la chapelle de la Croix aux dimensions d'une église et la douce harmonie des édifices du XVIe siècle. Cernée de chênes et de châtaigniers, la chapelle est peu fréquentée mais les villageois s'y rendent en foule, en septembre, pour le pardon. De ce monument historique, datant de 1522, il ne reste que des murs noircis, des moignons de poutres calcinées et des amas d'ardoises brisées. "La charpente et des statues polychromes du XVe siècle ont été détruites. Alors qu'un chantier de rénovation de 300 000 euros devait commencer deux jours plus tard, tout est à refaire, se lamente le maire, Jean-Claude Albert, soulagé que les incendiaires soient "hors d'état de nuire".

Le mercredi 20 mai, une lettre de revendication adressée à la rédaction du quotidien Le Télégramme aurait pu lever une partie du mystère. "True Armorik Black Metal" s'y présentait comme un groupuscule extrémiste anti-ecclésiastique qui prétendait "laver la terre d'Armorique des intrus qui y ont pris place sans le moindre respect pour nos racines celtiques". Jusque-là, les enquêteurs qui s'étaient orientés vers les milieux sataniques attribuaient le sigle "TABM" à True Aryan Black Metal, une frange extrémiste de la mouvance musicale Black Metal qui revendique une filiation avec le diable. Figure emblématique de cette tendance dure, le chanteur américain Marilyn Manson, dont les fans se comptent par millions, devrait donner un concert, cet été, dans les Côtes-d'Armor...

En annonçant qu'ils feraient "tomber les icônes symbolisant la faiblesse d'esprit", les signataires menaçaient : "Nous allons frapper encore et encore." Amateurs de Black Metal, ils ne se référaient pourtant pas plus aux Aryens qu'au maître des ténèbres.

Robert BELLERET


24.6.07

Le soufisme et la France

L'époque médiévale

L'histoire s'écrit parfois davantage en filigranes qu'en traits pleins. C'est le cas lorsqu'il s'agit des rapports entre des voies spirituelles ou ésotériques issues de religions différentes. Si l'influence de la civilisation islamique sur l'Europe est avérée dans les domaines des sciences et de la philosophie, nous sommes par contre réduits à des « conjectures » en ce qui concerne la discipline du soufisme (tasawwuf) [1].

A l'époque médiévale, les docteurs chrétiens d'Europe focalisent clairement leur intérêt pour les auteurs musulmans sur la pensée aristotélicienne. De Ghazâlî (« Algazel », m. 1111), ils traduisent les textes philosophiques mais non les écrits mystiques, pourtant bien diffusés en terre d'islam, et ils prennent d'Ibn Sab'în le logicien et le philosophe, non le métaphysicien extatique de « l'Unicité absolue ».

Que le maître andalou Ibn 'Arabî (m. 1240) n'ait pas été connu en Europe avant l'époque moderne – son influence sur Dante, à ce jour, reste plus qu'hypothétique – n'est guère étonnant pour deux raisons au moins : en pays musulman même, son œuvre a circulé longtemps dans des milieux restreints, et les latins n'avaient pas les clés pour déchiffrer son langage le plus souvent hermétique.

Mais que les manuels de soufisme rédigés aux Xe et XIe siècles n'aient reçu aucun écho en Europe ne cesse de surprendre. Le Catalan Ramon Lulle (m. 1315) a certainement eu accès à la littérature mystique de l'islam et côtoyé des milieux soufis, à Majorque et au Maghreb, mais sans réellement s'en pénétrer [2]. Quoi qu'il en soit, il ne relève pas du monde français qui nous retient ici.

La mystique juive médiévale, en revanche, témoigne d'une imprégnation profonde – et avouée – par le tasawwuf, au Moyen Orient, en Espagne musulmane, et jusqu'en Catalogne et en Provence. L'influence supputée du soufisme sur Sainte Thérèse d'Avila et Saint Jean de la Croix aurait cheminé via les mystiques juifs espagnols. Par ailleurs, les sciences occultes telles que l'alchimie, l'astrologie ou l'arithmologie doivent beaucoup au monde de l'islam, mais elles ne sauraient être identifiées à la discipline du tasawwuf.

Dans les milieux spiritualistes contemporains, d'obédience musulmane ou chrétienne, on affirme que les voies soufies, et les groupes ésotériques d'Orient en général, auraient alimenté sur le plan initiatique des organisations correspondantes d'Europe. Si certains historiens conviennent que l'art héraldique de la chevalerie européenne a une dette à l'égard du monde musulman [3], il faut être plus prudent quant à l'origine islamique de la chevalerie elle-même.

La futuwwa, qui jouait au Moyen Orient le rôle à la fois d'une chevalerie spirituelle et d'une initiation aux métiers, a-t-elle eu une part quelconque dans la formation de la chevalerie européenne ? Henry Corbin note d'abord que la futuwwa est œcuménique en soi car son fondateur symbolique en serait Abraham, père des trois monothéismes. Il souligne maintes fois les analogies et les concomitances existant entre cette futuwwa et la chevalerie européenne telle que celle du Temple [4].

Plus rarement, il évoque une influence directe de l'ésotérisme islamique – soufi ou ismaélien – sur les Templiers [5], mais il ne fournit aucun élément historique objectif. La légende du Graal, il est vrai, telle qu'elle apparaît dans le Parzival de Wolfram von Eschenbach, écrit à l'époque de la quatrième croisade, véhicule des données provenant de plusieurs traditions ésotériques orientales [6]. La version 'française' de la légende par Chrétien de Troyes, un peu antérieure à celle de Wolfram, en est, elle, cependant, totalement dépourvue.

René Guénon lui aussi affirme que les Templiers auraient été en contact effectif avec les milieux initiatiques du Proche Orient et que, après leur élimination par le roi Philippe le Bel (1314), les initiés chrétiens se seraient réorganisés en accord avec les initiés musulmans [7]. Il n'apporte, lui non plus, aucun justificatif concret. Certes, les Templiers se sont montrés plus tolérants que les autres Francs. Ainsi, un chroniqueur musulman témoigne que des Templiers sont intervenus à plusieurs reprises, à Jérusalem, pour chasser un Franc qui voulait l'empêcher de prier [8].

On peut même admettre que l'Ordre, de militaire, soit devenu de plus en plus mystique, mais cela ne signifie pas qu'il ait été perméable à l'islam ou à son ésotérisme. Les sources arabes s'en seraient fait l'écho et, au demeurant, elles montrent que les soufis considéraient tous les Francs comme des envahisseurs et des ennemis, et qu'ils les combattaient. Les chiites ismaéliens pratiquaient entre eux la discipline de l'arcane, et on les voit mal initier des guerriers francs. Des échanges en matière de spiritualité ont sans doute eu lieu, mais les visées politiques devaient prédominer.

Guénon va plus loin concernant les Rose Croix – dont les modernes Rosicruciens se prétendent les héritiers – puisqu'il y aurait eu, selon lui, une sorte d'osmose initiatique entre ceux-ci et les soufis [9]. Les premiers se seraient retirés en « Orient » au XVIIe siècle, lorsque toute possibilité de véritable initiation aurait disparu en Occident [10]. Ailleurs, il affirme que les Rose Croix, qu'il se voit fondé à appeler « ''soufis'' européens », établissaient un contact permanent avec les soufis [11].

Ces données relèvent plus de la métahistoire que de la discipline historique critique, mais c'est, pour notre domaine, une dimension que l'on ne peut écarter. L'intérêt de ces assertions provient aussi du fait qu'elles proviennent de René Guénon. Des affinités entre Saint François d'Assise et le soufisme, concernant notamment la doctrine de la « pauvreté spirituelle », ont été notées, d'autant plus que François s'est rendu en Egypte où il a pu échanger avec le sultan et des oulémas, mais il est italien… Des Franciscains français contemporains ont cependant écrit sur ce sujet.

Une des seules traces tangibles de la présence du soufisme en France à l'époque médiévale provient d'un proche du roi Saint Louis, son chroniqueur et ami Joinville (m. 1317). Celui-ci cite le Dominicain Yves Le Breton, arabisant, qui avait rencontré à Acre au XIIIe siècle une femme tenant le même langage sur l'amour divin que Râbi'a 'Adawiyya (m. 801), la sainte musulmane la plus renommée en terre d'islam.

Cette sainte irakienne n'est pas identifiée par Joinville, mais sa figure mythifiée va nourrir le débat théologique sur l'amour de Dieu qui agite la France… au XVIIe siècle, et elle suscite l'admiration des partisans du Pur Amour : il faut aimer Dieu ni par désir de Son paradis ni par crainte de Son enfer [12]. Pour autant, cette légende transmuée de Râbi'a ne prouve en rien une réception positive du soufisme en France.

D'évidence, la présence franque au Proche-Orient a permis des contacts entre chrétiens et musulmans, au gré, notamment, des alliances entre les princes des deux camps. Dans le cadre général de l'affrontement entre croisés et musulmans, cependant, le commerce des esprits ne pouvait s'effectuer que de manière discrète et orale, ce qui explique la trace infime qu'il a laissée.

La guerre elle-même a été une occasion de connaissance mutuelle, et parfois de ''transfert'' religieux : un des Francs qui attaquaient Damiette en 1249 (avec St Louis : septième croisade) serait entré en islam après avoir tué un saint musulman qui lui aurait miraculeusement répondu après sa mort [13]. Pour autant, à lire les sources arabes, de tels cas sont très exceptionnels.

L'époque moderne

Hormis quelques relations de voyageurs français ayant décrit, entre les XVIe et XVIIIe siècles, avec force partialité, les milieux des « derviches » en Orient (de Nicolay, Chardin…), ou encore la traduction française des Mille et Une Nuits par Galland, à la fin du XVIIIe siècle, où figurent les exploits des Kalandars, il faut attendre le XIXe siècle pour que le public français ait accès à une connaissance plus objective du soufisme. Le Voyage en Orient de Gérard de Nerval (1843) représente à cet égard une rupture décisive, par le témoignage empathique qu'il livre, voire la profonde fascination qu'exercent sur l'auteur les derviches du Caire et d'Istanbul.

Le terme occidental « soufisme » apparaît, sous la forme latine de Ssufismus, dans un ouvrage publié à Berlin en 1821. La première moitié du XIXe siècle voit se développer l'orientalisme académique, dans lequel la France occupe une place prépondérante. Le soufisme suscite dès lors un nombre croissant d'études et de traductions, centrées d'abord sur le monde persan.

D'évidence, cette érudition un peu sèche n'est pas animée par une quête intérieure, comme c'était le cas chez les auteurs médiévaux [14], et de plus elle charrie implicitement l'idéologie de la suprématie européenne ; elle fournit pourtant une matière objective qui va nourrir les générations postérieures. Parallèlement, des officiers français des « affaires indigènes », motivés, certes, par le contrôle des populations locales, vont rédiger des rapports et des ouvrages très documentés sur les confréries maghrébines.

Au XXe siècle, l'orientalisme français joue un rôle de plus en plus déterminant dans la connaissance ''gustative'' du soufisme, du fait sans doute que ses plus éminents spécialistes sont eux-mêmes engagés dans une quête spirituelle. Dans leur démarche respective de chrétiens, Louis Massignon et Henry Corbin se sont alimentés à la mystique musulmane et, à leur tour, ont alimenté un public se situant à la limite entre académisme et recherche intérieure.

Si leur enjeu personnel affleure souvent dans leur travail et s'il infléchit parfois leur objectivité, leur riche personnalité a contribué à diffuser la culture soufie en France. Les ''soufis'' contemporains reconnaissent également une dette à l'égard de religieux chrétiens qui ont présenté des pans majeurs du patrimoine soufi : Louis Gardet, Laugier de Beaurecueil, Paul Nwyia… Certains chercheurs ont conjoint domaine d'étude et orientation spirituelle en pratiquant l'islam soufi, tel Eva de Vitray-Meyerovitch (m. 1998) et Michel Chodkiewicz.

La première présence effective en France d'un soufi ou d'un groupe soufi remonte à nul autre que l'émir Abd El-Kader, qui a été retenu dans notre pays durant cinq années (1847-1852). Tous les Français qui l'ont alors approché ont été séduits par son charisme, et des documents inédits nous montrent des sœurs chrétiennes désirant le suivre jusque dans son exil spirituel en Orient.

Le paradoxe du colonialisme français, à la fin du XIXe siècle, est qu'il permet à quelques nationaux issus de la métropole d'échapper à la civilisation d'ores et déjà désenchantée de l'Occident, et de se ressourcer dans le « désert », ou en « Orient », comme on voudra. Ces premiers soufis français – ou de culture française – sont souvent des artistes-peintres (Etienne Dinet, Yvan Agueli) ou des écrivains (Isabelle Eberhardt). Ils souscrivent au ''mythe'' de l'Orient spirituel et l'incarnent dans leur vie et leur œuvre. Ils se rattachent à des confréries régulières, et ceux qui vivent en Algérie sont rejetés par des colons français.

L'importance d'Agueli réside dans le fait qu'il a planté le premier arbre initiatique en France et qu'il a affilié Guénon à la Shâdhiliyya, en 1912, à Paris même. Le parcours – bref, puisqu'elle est morte à vingt-sept ans – d'Isabelle Eberhardt (m. 1904) est plus fantasque. Ses origines sont troubles, puisque certains attribuent sa paternité à Arthur Rimbaud. Devenue française en épousant un soufi algérien, elle pratique dûment le soufisme dans la confrérie Rahmâniyya [15].

Même lorsqu'elle ne possède pas cette texture légendaire, la vie de ces pionniers devient par la suite un roman. Ainsi d'Aurélie Picard (m. 1933), héroïne de Djebel Amour (Frison Roche), Lorraine qui épouse en 1872 un cheikh tijâni du Sud algérien et développe la grande zâwiya après la mort de celui-ci. Autre figure féminine atypique de cette période, la comtesse Valentine de Saint Point (m. 1953), arrière petite-nièce de Lamartine qui, après avoir mené une vie excentrique en Occident, entre en islam et s'établit au Caire, où elle est proche de Guénon.

René Guénon est le principal artisan de la pénétration du soufisme en France au XXe siècle. Sa pratique islamique et son appartenance soufie ont pourtant été marquées du sceau de la discrétion, mais son œuvre ainsi que la correspondance qu'il a entretenue avec beaucoup de ''chercheurs de vérité'', a déterminé l'entrée dans la Voie de nombreux Français ; ceux-ci seront souvent affiliés à la même voie-mère que Guénon, la Shâdhiliyya, qui a généralement incarné un soufisme sobre et lettré. Son œuvre formule à l'intention du public européen la doctrine de la « Tradition primordiale », d'où émanent toutes les religions historiques, et la dégénérescence de la modernité occidentale.

Le « cheikh 'Abd al-Wâhid Yahia », tel qu'il est connu en milieu musulman, établi au Caire en 1930 et décédé en 1951, continue d'exercer une influence singulière en Occident et dans quelques cercles en terre d'islam. De Guénon est issu le courant ''traditionnaliste'' du soufisme occidental, dont la figure majeure est Frithjof Schuon (m. 1998). Artiste et poète, celui-ci rédige une œuvre doctrinale puissante ; depuis la Suisse où il réside jusqu'en 1981, date de son installation aux USA, il touche surtout des intellectuels occidentaux. Son représentant initial à Paris, le Roumain Michel Vâlsan (m. 1974), lui reproche en 1950 de s'affranchir de plus en plus de la norme islamique et de verser dans le syncrétisme.

A l'instigation de Guénon, Vâlsan, éditeur des Editions traditionnelles à Paris, fonde sa propre voie, centrée sur l'enseignement d'Ibn 'Arabî. Plusieurs de ses disciples français, universitaires ou autodidactes, proposent au public des études et des traductions de textes majeurs du patrimoine soufi.

Eric "Younès" Geoffroy


16.5.07

Une "lettre" reçue qui influence en douceur...

1. Il y a au moins 5 personnes dans ce monde qui t'aiment au point de mourir pour toi.

2. Il y a au moins 15 personnes qui t'aiment d'une certaine manière.

3 La seule raison pour laquelle une personne te déteste c'est parce qu'elle veut être comme toi.

4. Un sourire de toi apporte de la joie à quelqu'un même s'il ne t'aime pas.

5. Toutes les nuits, quelqu'un pense à toi avant d'aller se coucher.

6. Tu représentes le monde pour quelqu'un.

7. Si ce n'était pas pour toi,quelqu'un ne pourrait pas vivre.

8. Tu es Spécial et Unique

9. Quelqu'un dont tu ignores l'existence t'aime.

10. Quand tu fais la plus grosse bêtise,quelque chose de bien provient de celle-ci.

11. Quand tu penses que le monde te tourne le dos, regarde bien c'est surtout toi qui tourne le dos au monde!!!!

12. Quand tu penses que tu n'as pas de chance, quand tu n'as pas ce que tu veux, tu ne l'auras probablement pas. Si tu crois en toi, probablement,tôt ou tard, tu l'auras.

13. Souviens-toi toujours des compliments que tu reçois Oublie les remarques méchantes.

14. Dis toujours aux gens ce que tu ressens à propos d'eux, tu te sentiras mieux quand ils le sauront.

15. Personne ne mérite tes larmes et tes pleurs, et celui qui le mérite vraiment ne te fera jamais pleurer.

16. Si tu as un meilleur ami prends le temps de lui dire ce qu'il représente pour toi.